En 2005, le très distingué animateur de radio, Paul Arcand sortait son docufilm – Les voleurs d’enfance, qui dévoilait au grand jour les ratées de la DPJ (Direction de la Protection de la Jeunesse) dans sa pratique. L’animateur questionne leurs responsabilités citoyennes et institutionnelles face aux enfants, en allant de la lourdeur de la bureaucratie de l’organisme, en passant par les abus sexuels que certains d’entre eux ont été victimes. Bref, je vous recommande le visionnement de ce film.
Monsieur Arcand et son équipe de recherchistes ont pu faire la lumière sur quelques manquements de la DPJ, qu’ont eue des conséquences sur plusieurs enfants en famille ou centre d’accueil. Vraiment une triste réalité qui malheureusement fut vraie.
« Les voleurs d’enfance, ce sont les pédophiles, les agresseurs. »
« Le vrai voleur d’enfance, c’est le silence des adultes. »

Quel est le lien avec mon histoire?
Avant de débuter, j’aimerais vous dire que moi et ma petite sœur, Jaime, n’avons jamais été placés dans une famille d’accueil. Toutefois, notre famille a été l’hôte d’environ 25 jeunes délinquants sur une période d’un peu moins de 5 ans. Je mentionne « jeunes délinquants », car nous étions une ressource d’accueil en milieu familial pour jeunes ayant des problèmes de comportements. Ces adolescents et adolescentes âgés entre 12 et 17 ans, la plupart d’entre eux sortaient tout juste de prison pour jeunes (Huberdeau), de centres d’accueil ou de familles dysfonctionnelles. De 1987 à 1991, de Pine Hill à Lachute dans les Laurentides, nous, moi et ma sœur, avions des frères et des sœurs d’accueil.
Moi et Jaime, prononcé Djay-mi, ma sœurette, aujourd’hui âgés dans le début de quarantaine, nous sommes des personnes spécialement spéciales (dans notre cas, ça se dit)! Tous les deux avons reçu les diagnostiques d’un trouble de personnalité limite (TPL) dite « Borderline », de dépressions majeures et d’un trouble d’anxiété généralisé (TAG). De son côté, ma petite sœur a aussi en plus un trouble de déficit de l’attention (TDA), ainsi qu’un trouble de la personnalité dépendante (TPD). L’une des causes communes à tous ces troubles psychologiques c’est que c’est un stress post-traumatique pendant l’enfance. Cliquez ici pour lire l’article concernant TPL – Bordeline.
Nous deux, enfants de famille d’accueil, depuis d’état de panique assez fréquente sommes confrontés quotidiennement. En consultant chacun de notre côté, on apprend qu’on souffre d’un stress post-traumatique. Ayant une enfance peu stable à l’adolescence, les traits psychologiques se développent en troubles. Et, depuis notre passage chacun à l’âge adulte, vivre devient de plus en plus difficile. On appelle ça survivre. Maintenant, on voit chacun de nos enfants grandir, et de plus en plus à chaque, jour nous avons une boule en permanence à l’estomac. Cette boule, j’ai su avec ma thérapie au CETAS, que c’était un mélange de honte et de dégoût.

En janvier 2022, j’ai appris également au CETAS qu’en plus de la dizaine d’agressions sexuelles incluant de l’inceste, ce que j’avais subi allait plus loin, que c’était un mode de vie qu’on appelle incestuel. Pour en savoir plus cliquer ici.
Quel est le lien avec l’incestuel?
Peut-être aucun! Mais je vous relate notre enfance à moi et ma tite sœur que j’adore, avec sa permission, évidemment!

C’est en 1987, lorsque j’avais 7 ou huit ans que mes parents ont eu l’idée de devenir famille d’accueil. Ils étaient propriétaire de l’hôtel/bar le Pine Hill Lodge qui roulait bien les fins de semaine, mais la clientèle quotidienne de jour de semaine ne suffisait pas à faire vivre toute la famille. Donc ça a débuté par un seul garçon qu’on a gardé plusieurs mois, il s’appelait Stéphane et il avait environ 16 ou 17 ans. Je n’ai jamais demandé combien ça payait de garder ces jeunes, car même si je l’avais demandé, on m’aurait répondu comme d’habitude, « c’est pas de tes câlisse d’affaires ».
Des réponses telles que celle-ci furent omniprésentes de la part des parents;
« Qu’est-ce qu’on mange? « D’la marde pis des patates »
« Où on va? « Suis et ferme ta gueule »
« Braille, chie, pète, rote, vomit, j’men câlisse »
« Veux-tu ben me câlisser patience »
« Va dont jouer dans l’traffic »
« Bite my shorts »
Et ça, c’est seulement une courte énumération des phrases méchantes toutes faites d’avance. Vous en avez probablement plein, vous aussi, des insultes que vos parents vous disaient?
Stéphane est demeuré plusieurs mois avec nous, et mon petit doigt me dit que nous avons eu un impact positif dans la vie de ce garçon. Il trippait sur les outils Snap-On. Un grand frère qui fut important dans ma vie, car vous savez, lorsqu’on accueille un enfant étranger dans NOTRE famille, ça peut être déstabilisant. Mais avec lui la transition fut douce et agréable.
Rappelez-vous maintenant qu’un climat où règne l’incestuel, l’enfant légitime n’est pas considéré comme une personne à part entière. Où l’enfant demeure dans un flou, avec absence de limite, servant à projeter une image positive d’une famille parfaite et parfois même servir d’alibis.
Le deuxième garçon à intégrer la famille d’accueil fût Alain « Doigt Dans Le Nez ». Surnom que lui avait donné mon père, demandez-moi pas la raison, aucune espèce d’idée. Haha! Une fois nous sommes allés en voyage au Lake George (NY), la vraie famille, et ce garçon. Bizarre, mais nous avons logé au même endroit que j’étais allé avec cHOSE deux ans plus tard. Aujourd’hui, monsieur aux « DDLN » est malheureusement décédé.
Pour moi à l’époque, être une famille d’accueil signifiait « garder des jeunes en difficulté ». Datsit! J’ai su beaucoup plus tard qu’il existait aussi des milieux sains. Pour ma part, mon enfance s’est arrêtée là. On a subi, moi et ma sœur, des agressions physiques, verbales et sexuelles, et on en a bavé. Aujourd’hui, j’ai compris qu’ils (frères et sœurs d’accueil) avaient besoin d’aide à l’époque. Mais à l’époque on s’en foutait.
RC, âgé de quinze ou seize ans et sympathique jeune homme, fut le troisième garçon à intégrer la famille dans la maison familiale de Pine Hill. Ce jeune homme aimait beaucoup raconter des histoires macabrement abracadabrantes avant de dormir à moi et ma petite sœur. Par exemple, il mentionnait que Napoléon Bonaparte était l’antéchrist, et un peu comme les intentions de Hitler, le puissant français voulait dominer le Monde en massacrant des opposants, patati et patata, voyez l’genre! Ça m’a marqué, mais avec les nombreux livres d’encyclopédie que j’avais reçu en cadeau de Première Communion de la part de mon parrain, j’ai vite été en mesure de me renseigner sur Napoléon, v’oyez!
Un événement chamboulant a mit fin au séjour de RC, et ce, de façon abrupte. Si ce garçon n’est demeuré que quelques mois, c’est qu’il faisait avec nous, des jeux sexuels. J’avais environ 7 ans, et ma petite sœur Jaime, 5 ans. Depuis la chambre côté nord de la maison, à plusieurs reprises il m’agressa. Une fois, il enferma ma sœur Jaime dans la garde-robe en bloquant la vitre-miroir coulissant pour pouvoir m’agresser une coche au-dessus.
Comme nous avions l’habitude de faire en vraie famille « nous quatre » plusieurs fois par année, nous séjournions de temps en temps, le temps d’un week-end, à Montréal. À la piscine de l’hôtel, nous en profitions pour nous baigner (Holiday Inn – Crowne Plaza, sur Sherbrooke), pour magasiner à la place Desjardins, pour manger quelques roteux sur la rue St-Laurent, et bien sûr en soirée, se faire garder par Annette Bourbonnais, notre gardienne favorite du complexe hôtelier. Mes parents en profitaient pour sortir dans des bars gais ou des saunas « pour homme seulement ». Je me rappelle en plus du 281, il y avait le Club David, et un l’Entre-Peau, et d’autres que j’oublie.
Un soir, après une bonne baignade, où j’étais seul avec ma mère et ma sœur dans notre chambre d’hôtel, je suis allé à la salle de bains où je me suis mis à pleurer. Ma mère, tout de suite alertée par le bruit étouffé des sanglots, entra dans la pièce, et me demanda ce qu’il n’allait pas. – « Maman, j’pense j’ai le SIDA! », lui chuchotais-je. Ma mère, surprise de ce que je venais de dire, me demande avec empressement: « Comment ça le Sida? Osti, t’as juste 7 ans! ». Je lui montrai mon pénis qui était effectivement de couleur rouge foncé, mais qui s’avérait être une infection urinaire ou de quoi du genre, mais pas de Sida!
Je lui ai tout raconté ce qui se passait avec mon « frère d’accueil » et AW, le travailleur social attitré à notre famille d’accueil fut mis au courant des attouchements, et le lendemain, le dimanche, la police venait récupérer RC au domicile de Pine Hill.
Pour terminer l’histoire avec RC, que je n’ai jamais revu d’ailleurs, quelques semaines plus tard, je rencontrais avec mes parents une travailleuse sociale qui nous expliqua que RC avait avoué ce qu’il m’avait fait, et qu’il n’aurait pas de plaintes ou de procès. Elle termina l’entretien et demanda à mes parents s’ils aimeraient que Shannon consulte un psychologue, et ont répondus dans la négative. Dossier clos.
Ensuite vint le garçon étant resté avec nous le plus longtemps, presque 5 ans. JP. Cet ado arriva au sein de la famille à l’âge de 14 ans, de mon côté j’étais âgé de 8 ans. Un grand frère d’accueil que j’ai quand même beaucoup apprécié, même s’il arriva quelques incidents tragiques, le concernant. Il était de toute évidence le préféré de mon père. Il dormait avec lui, le traita souvent avec privilèges et lui massa même le visage de Noxzema. Son statut d’ancien et de régulier lui donnait souvent le rôle de boss des bécosses, et à ses 16 et 17 ans, c’est ce garçon qui nous gardait. « Nous » étant moi, ma sœur et les 20 autres adolescents qui demeuraient en famille d’accueil. JP demeura avec nous jusqu’à ses 18 ans.
Enfin des filles!!!! Du moins une première cohorte de deux sœurs ND et SD. La plus âgée, ND, a influencé très positivement mes goûts musicaux. Cette blondinette m’initia à des groupes hip-hop tels que; Run DMC, Beastie Boys, Ice-Cube, DJ Jazzy Jeff & The Fresh Prince, N.W.A., etc. Sa sœur SD, beaucoup plus timide, deviendra ma « fréquentation » vers l’âge de mes 10 ans.
Rappelez-vous que mes parents tenaient un bar où des orchestres rock performaient tout le weekend « en résidence ». C’est-à-dire qu’après leurs sets, aux petites heures du matin, les musiciens avaient leurs chambres d’attitrées au deuxième étage du bar. Pendant que mes parents s’occupaient du bar, c’est une résidente du foyer d’accueil pour personnes âgées de Mononcle et Matante Tartempion, une dénommée Lise, âgée d’environ 128 ans. Elle ne voyait tellement rien, qu’on buvait de l’alcool dans sa face, elle n’y voyait que du feu! J’pense qu’elle souffrait de narcolepsie, et même réveillée elle semblait dormir.
Nous n’avions pas de câble, et il arriva de temps en temps que je regardasse certains films assez weird pendant que la gardienne sommeillait sur le Lay-Z-Boy et moi sur le Chesterfield (sofa ou divan pour les fins connaisseurs), c’est là que je me suis tappé les VHS de Face à la mort, Caligula, Cannibal Holocaust et Barnens ö, un film suédois assez ouvert d’esprit, peut-être même trop.
Pour l’alcool, il était facile de m’en procurer, mais je n’ai dirai pas trop sur le sujet afin d’éviter des problèmes à des membres de ma famille, mais, nous avions dans notre maison, une pièce discrète servant à cacher des caisses et des caisses d’alcool. Légales ou de contrebandes, peu importe, ces centaines de bouteilles de 60 onces ont marqué ma jeunesse. Ceux que je préférais, au goût étaient évidemment les crèmes et les liqueurs telles que le Tia Maria et le Peach Schnapp, mais ceux qui gommait le plus étaient le gin Beefeater et le fameux rhum Bacardi qui, supposément, allait nous métamorphoser en chauve-souris! Hein Mr Bonheur?
Mes parents avaient la brillante idée, à des dizaines de reprises, de nous faire des surprises, mais d’immenses surprises. Un soir, ils nous ont réveillés, ma sœur et moi, à deux ou trois heures du matin, et ils nous disent qu’on part en auto en Floride, right now. Les valises étaient faites. Une fois à quelques jours avant Noël, sur la proposition de mon père, j’ai eu droit d’inviter un ami, donc j’appelai le meilleur d’entre eux, Mr Bonheur.
*Dring* *Dring* j’appelle chez mon ami. Il est passé 3ham. Il est très tôt. Ou très tard, comme disaient mes parents, les tenanciers du bar. Le père de mon ami répond « quoi » de son air bête naturel, et il remet l’appareil, sans rien dire à sa femme.
« Bonjour, c’est Shannon. Je sais qu’il est tard, mais on part dans moins d’une heure pour la Floride, et j’aimerais inviter… » – Répétais-je mon scénario à la Maman de mon ami.
« Shannon, il est bien tôt (Bingo! J’savais!). Mais oui, je vais le réveiller.
La mère de mon ami alla le réveiller en pleine nuit et lui présenta un bas de Noël avec une orange à l’intérieur. Mon ami la dévisagea d’un air interrogatoire, se demandant qu’est-ce que sa mère pouvait bien faire à cette heure dans sa chambre. Elle lui annonça qu’il partait en Floride… genre NOW! On a eu énormément de plaisir là-bas! J’ai encore de beaux souvenirs. On a même conduit un tank!
Excepté lui, j’avais peu d’amis. J’étais souvent seul, avec mon couteau de Rambo et mon fusil à plomb!
Déménagement à Lachute
À mes 9 ans, un vendredi quelconque de février 1989, l’hôtel-bar le Pine-Hill Lodge est en vente, nous déménageons dans une grande maison ancestrale sur la rue Millway à Lachute, et c’est pendant ces deux prochaines années et demie que les séjours des jeunes résidents se succédèrent. Il y a toujours un ou deux réguliers, mais la plupart ne sont qu’avec nous temporairement, d’autres fuguent, certains commettent des crimes et retournent en centre d’accueil, etc. À ce moment il y a une majorité de garçons.
Comme on dit en créole: ki di vilnerab jenn gason, di dominan blan. Pou seksyèl!
Ouf, tels des vautours, plusieurs gravitent autour du pot de miel. Mais ça, c’est pas de mes affaires, ça appartient à d’autres. Si j’ai une chose à vous dire les boys, assumez!
Woohoo! Enfin d’autres filles! De la vingtaine de jeunes que nous avons hébergés, environ sept ou huit filles furent mes sœurs d’accueil, dont une fut ma petite amie. I know it’s weird. On a sorti environ le temps d’un été, j’avais 10 et elle 16. On était souvent ensemble, on se frenchait tout le temps, même dans l’coffre du station-wagon au dedans d’imitation « mahogany », en descendant sa Rive-sud!
J’en ai retrouvé plusieurs grâces à l’arrivée de Facebook, c’eût été un jeu d’enfant de retrouver certains de ces anciens colocataires, donc j’ai pu garder contact. Tristement et tragiquement, au fil des ans, plusieurs de ceux qu’on gardait sont décédés, principalement par suicide.
De 9 à mes onze ans ont a en fait et on m’en a fait faire des conneries!
On jouait de temps en temps à un jeu d’étranglement où il fallait prendre et retenir une bonne bouffée d’air, se lever la tête en l’air et un autre personne devant, avec la paume de ses mains, serre de chaque côté de la trachée. Comme ça, la personne respire encore, mais il y a un manque de sang et d’oxygène au cerveau. Ce jeu, je l’ai fait des dizaines de fois. La dernière fois fut lorsque la personne qui devait m’empêcher de tomber par l’arrière et de me faire mal, a eu la brillante idée de s’accroupir derrière moi. Environ 5 secondes plus tard, je me réveillais avec un mal de cou et un lèvre fendue.
*Avertissement, ne jamais tenter ça. J’ai décidé d’être explicite afin de comprendre le phénomène.
À 11 ans une fois, je me liais d’amitié avec un « BS d’la terrasse Saindon » ou si vous aimez mieux Ayersvillois. Il était âgé de 18 ans. Un weekend, nous avons joué à des jeux vidéos jour et nuit, non-stop. Pour résister au sommeil, nous mangions littéralement du café instantané mélangé avec du Coke. Je ne me souviens pas trop pourquoi, mais un jour, cet ami dépassant largement mon ainé, est arrivé chez moi, vous savez la grande maison ancestrale. Ben un des résidents lui a sacré une volée, pis d’aplomb à part ça. On m’a interdit de le revoir, et encore aujourd’hui, c’est un mystère.
La saga avec le Pine-Hill Logde est enfin terminée, mes parents ont tout vendu. Une page importante de mon histoire s’est tournée.
Les vautours dont je parlais plus tôt étaient de plus en plus présent autours des jeunes. Ceux-ci on tenté à plusieurs reprises d’avoir une partie de ma chair, mais vous savez, à partir de 10 ans… On touche pu à tchagg!!
Le dernier qui s’est essayé sur moi fut, CB, l’un des pires vautours. L’histoire: Étant une personne de grand cœur, et aimant rendre service, aussi incapable de dire « NON », mais c’ets une autre histoire. Bref, je suis allé aidé cet ami de la famille qui avait besoin d’aide pour peinturer son nouvel appartement, boulevard Argenteuil. Je suis debout sur un escabeau et je fais du bon travail éreintant au plafond. Lui, CB, trente ans mon ainé me demande:
-« Tsé Shan, toé pis moé, on est comme des frères, hein? ».
-« Euh, oui, oui, je t’apprécie, t’es un bon ami de la famille. » Lui répondis-je.
-« Pis entre frères, on se supporte, hein bro’? » Me relance-t-il. Et il continua,
-« peux-tu te masturber devant moi? ».
WTF
Autre anecdote du même rapace. Toujours vers l’âge de 10 ans, mon père décide d’aller en voyage en Floride (pour la six ou la neuvième fois), mais cette fois-ci avec les jeunes résidents en famille d’accueil. Moi, mon père, ma petite sœur (8 ans), un vautour, quatre jeunes en famille d’accueil (3 gars, 1 fille), et nous étions séparés en 2 voitures. Je parlerais uniquement de celle dans laquelle je me trouvais.
Je suis assis seul sur la banquette arrière de ladite voiture, une Géo Métro rouge, et en avant, un adolescent de quinze ans, du côté passager. Le conducteur, c’est un « ami » proche de la famille, un peu trop proche même, vous savez un de ces oiseaux qui m’écœurent. Bref, pour une raison ou une autre, les deux voitures se sont perdues de vue sur le highway dans l’état de New York. J’en étais à ma énième fois à faire ce trajet en auto, et je connais ma géographie comme un enfant connait ses tables de multiplication. Je leur indique le chemin. Un est d’accord avec moi, l’autre non.
Nous sommes en plein cœur de la Virginie, arrêté dans un « trucktrop 24h », et littéralement une chicane de couple se déroule devant mes yeux. Ils s’engueulent. L’un frappe d’autre. Ils pleurent. Le conducteur, l’ami de la famille, un homme de 40 ans refusaient de repartir de là tant et aussi longtemps qu’ils ne seraient pas réconciliés. SA-CRA-MENT! J’ai des « feedbacks » des agressions de mon oncle, qui se sont toujours déroulés ailleurs qu’au Québec, en voyage. L’idée d’être abandonnée encore une fois refait surface.
En conclusion de cette histoire, après environ une heure, ils ont fini par se pardonner, en chialant gaiement et à s’embrasser langoureusement tout en jurant qu’ils ne se chicanaient plus jamais! L’amour n’a pas d’âge qu’ils disent!! Maudit j’aurais voulu être ailleurs!
Quelques semaines plus tard, en revenant de voyage de l’a Floride, que je raconterai dans un autre article, nous n’avions plus la famille d’accueil. En vérité, JP, l’ainé et le chouchou de mon père a atteint sa majorité et est partit en appartement, les autres ont été dispersés dans d’autres familles. Aujourd’hui, avec l’aide de Facebook, j’ai recontacté ce grand gaillard, JP, et j’ai beaucoup d’admiration et d’empathie pour cet homme, aujourd’hui près de la cinquantaine.
Avec le peu d’argent que la vente de l’établissement de Pine-Hill a rapporté, ma mère retourna aux études pour terminer son diplôme d’études secondaires et un diplôme d’études professionnel en préposée aux bénéficiaires. Bravo Mom!!
La famille nucléaire éclate et ça a l’effet d’une bombe pour tous, sauf moi. Mon père déménage à Montréal, pour travailler et avoir accès facilement aux parcs louches, aux bars gais et les fameux saunas pour hommes seulement, que mon père appelle affectueusement « You Belong ». Ma mère, un soir de fin de semaine, décide de lui faire une visite « coucou surprise ». Il n’y avait plus aucun doute pour elle, mon père était gai. Quelques semaines plus tard, ils se sont séparés « légalement ». Le 28 avril 1991.
Ma mère accumule les jobs, préposée aux bénéficiaires à temps plein, « on the side » elle a quelques vétérans qu’elle prend soin, en plus de faire du ménage chez des personnes âgées. Durant les derniers jours à demeurer à Lachute nous trois, jusqu’au 1er juillet, dans la grande maison devenue soudainement tranquille, nous nous préparions à une autre vie, celle de monoparentale.
Déménagement à St-André-Est, comté d’Argenteuil!
Mes parents étant, comme on m’a toujours dis, « légalement séparés », nous quittions la maison cossue de Lachute, pour nous installer dans le petit village voisin de St-André-Est (maintenant St-André-Carillon) à quelques kilomètres de Lachute. La première année, soit en 1992 se déroula, du moins pour ma part, de façon normale. Beaucoup de premières fois!
1ère vraie blonde – SR
1er french d’amour – SR
Youppi! On a finalement le câble!
C’est en secondaire 2, donc à l’âge de 12 ans, sur la rue Davis dans un duplex aux airs de chaumières, que la vie normale viendra, du moins je le pense. Ma mère travaille beaucoup trop. Dans ses temps libres, elle commence à s’intéresser de plus en plus aux jeux de hasard. Aujourd’hui j’ai compris que c’était sa manière d’oublier le fait que son mari l’a crissé là avec 2 enfants, et qu’il était homosexuel en plus.
De plus en plus je participe aux activités sportives à l’école et les soirs et les weekends j’étais souvent au terrain de basketball, à la patinoire ou au terrain de baseball. Une routine s’installe; école, Nintendo, sport, dodo. Entre ça, je me bats assez régulièrement. Quand la bataille éclatait à la Polyvalente Lavigne, j’avais soit un abonnement aux retenues du soir ou un emploi à temps partiel de conciergerie (maudits travaux communautaires).
Sinon quand ça arrivait dans les rues de Saint-André, c’était avec les Anglais, soit lors de joute sportive ou sinon j’avais 2-3 réguliers avec les lesquels j’me battais.
Deux ans dans cette routine
À mes seize ans pile j’obtiens mon permis de conduire ainsi qu’une voiture que mon père m’a offerte. Une Dodge Lancer 1986 grise. C’est avec cette voiture que je commençai à travailler au Métro du « sandasha » à Lachute. Maudit que je détestais la superviseure, elle était toujours sur mon cas. Quand elle m’a sacré dehors, je lui ai dit de se refaire la face avec mon 4%. Ouf, j’pas fier de moi!
La troisième année la petite famille monoparentale déménage dans une maison unifamiliale sur la rue Maurice, sise dans le même village. Je suis en secondaire 3, et j’adore l’école! Ma petite sœur n’a pas la même chance que moi. Celle-ci n’a pas les notes de passages et intègre les classes à cheminement particulier.
Préférant faire la fête, sucer son pouce, manger ses Fuit Loop et écouter ses bonhommes, ma sœur n’aime pas l’école et personne ne l’aide. Ni moi ni Maman. Elle a 12 ans et a encore de la difficulté avec les bé, les dé, les pé et les qu. Sinon les emme pis les enne aussi.
La routine de Maman consiste à essayer de concilier ses 3 jobs, sa consommation d’alcool au bar et ses chums de gars (ou amis comme elle dit), et elle est présente un jour ou deux par semaine à la maison. Au moins la maison et les factures sont payées, mais la bouffe se fait rare.
Très souvent mon père qui est soit déménagé à Montréal, Toronto (ON), Plant City (FL) ou Prescott (ON) nous dépose de l’argent dans un compte conjoint pour qu’on puisse acheter du manger. Merci Papa!
Mes tantes restant dans le coin nous apportent à l’occasion des restants. Merci Matantes!
Pour la dernière partie de ma vie d’enfant, on s’installa en haut de la côte sur la rue Wales à Saint-André-d’Argenteuil. Les trois dernières années dans l’coin! Maman venait encore de temps en temps pour dormir, disons qu’elle avait une chambre en haut de l’hôtel Laurentien. Elle dormait là quand elle finissait de jouer d’in machine « pour amusement seulement? Yeah right! ». Ou bien qu’il était trop tard ou qu’elle avait trop bu. Ben elle avait sa chambre à quelques pas. Un lit d’appoint, un lavabo pour se laver « oralement » avec une débarbouillette, un cadran et une toilette partagée à l’étage.
Moi et ma petite sœur, pendant ce temps-là, on avait déjà eu un avant-goût de l’autonomie, vous souvenez? Sur la rue Maurice? Mais là, mon père est déménagé à Colombus, Ohio, et ma mère est dans ses moments les plus sombres, désolé Maman, mais tu n’allais pas bien. La séparation t’a fait beaucoup de peine et tu noyais ça dans tes 3 jobs que tu donnais beaucoup d’heures, ta vie d’hôtel après le travail, ton addiction aux jeux de hasard, tout ça pour dire que moi et ma sœur Jaime à 15 et 13 ans respectivement, Viva La Libertad!!!
Ma sœur lâche les cours et continu de « tripper », à se coucher et se réveiller tard, écouter les la télé toute la journée, inviter ou aller chez des amis faire la fête, ce genre de vie. Ah oui!! Elle traine en permanence sa « petite couverte » alias une taie d’oreiller avec laquelle elle suce toujours son pouce. J’la voit pas souvent ma tite sœur, mais si j’me trompe pas, elle le suce toujours à 42 ans. J’tm Jaime 😉
De mon côté, je n’aime pas trop faire la fête. J’suis allé dans plein de partys, j’ai aussi fait de méga-fête, mais jamais sur une base récurrente. De temps en temps je sortais de ma zone de confort, et j’allais tripper, moi aussi. Je suis le one-night-stand des amis, haha j’aime ça. Certainement j’ai ma tite clique que je voyais sur une base récurrente, mais on jouait à Donjons et Dragons, au PlayStation ou au Super Nintendo, on chillait comme des ados normaux, mais chez nous, j’étais souvent seul.
Je m’ennuyais pas, au contraire, j’aimais bien la liberté et la débrouillardise qui m’était offerte.
Mon père venait de me donner un PC Pentium V et venait d’avoir Internet 56K, j’avais constamment des amis qui dormais à la maison pour « chatter avec des chicks ». Un soir, un de mes amis a même rencontré ma mère pour la première fois, et celle-ci était assise, nue, sur le bol de toilette en train de couler un bronze… « Enchantée, Madame! ».
À 17 ans j’ai commencé à vendre de la marijuana. J’achetais mon stock chez les Indiens à Oka, je n’ai jamais su la sorte, mais plein de monde m’en achetait. 10 piastres le gramme. 25 le 3 grammes et demi. Un jour, pour faire plus d’argent, je me suis mis à les vendre préroulés. Je ne consommais pas, mais j’ai un talent naturel pour le roulage de joints. En bâton ou en cône, je peux même en faire avec des design! Les joints de 0,7 gramme se vendaient 10$, mais il était parfaitement roulé.
À 18 ans, je suis devenu majeur et vacciné. Je déménageai à Saint-Jérôme pour entamer mes études au CEGEP, et plus jamais je ne demeurai en Argenteuil.
Ma petite sœur et moi aujourd’hui, nous souffrons en silence. Cette jeunesse parsemée d’instabilité et d’incertitude nous accable encore aujourd’hui. Nous regardons nos enfants grandir et nous tentons, du mieux possible, de leur permettre de vivre avec une base solide.
En toute franchise, j’ai appris beaucoup de tout ça. Maintenant, même si travaille fort pour retrouver le « p’tit shannon » en moi, je suis en paix. Mais je tenais quand même à raconter mon histoire.
Aujourd’hui je parle à ma mère plusieurs fois par jour. Elle m’a toujours protégée, et elle me fait du bien. Elle n’a pas toujours fait les bons choix, mais pour moi, ça s’est bien passé.
Pour mon père, c’est difficile pour moi de lui parler parce qu’il a choisi son frère, mon agresseur. Le Duo Infernal! Je n’en parle pas dans ce texte, car j’étais majeur à l’époque, mais j’ai avoué à mon père à l’âge de 18 ans que son frère m’avait agressé à plusieurs reprises à l’âge de 7 et 8 ans. Pis pas juste des attouchements! Il a répondu: « j’le sais. Je lui ai dit de ne pas recommencer. »
J’ai reçu énormément de témoignages de victimes, de témoins directs et indirects, de gens qui ont entendu des choses. Relatant comment les dommages physiques et psychologiques que certains de ces jeunes en famille d’accueil ont subis.
Maintenant que fait-on avec ces autres enfants de la DPJ? Est-ce qu’on ouvre la canne de vers et trouve des coupables? On passe à autre chose, jusqu’à temps qu’un autre se suicide? Je sais ce que c’est d’être une bombe à retardement, j’y travaille quotidiennement à la désamorcer. Je souhaite que les autres gars, comme moi, qu’on subit des atrocités, ne gardent pas ça en dedans. Et qu’ils n’hésitent pas à chercher de l’aide.
Des pédophiles, y’en a plus qu’on pense. C’est des réseaux interlopes (undergrounds) bien organisés, et beaucoup se connaissent entre eux, à la recherche de petits écureuils! Attention à vos enfants. N’hésitez pas à en parler ouvertement. Plus on en parle, plus ils se cacheront.
#laissezlesenfantstranquilles
#everychildmatter
tchagg tchaggensen
Mise-à-jour 30 septembre 2022
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